« Un soir, sur un chemin familier qui m’est cher, en mettant mes pas dans les pas de ceux qui m’ont précédé sur cette terre, j’ai senti frissonner l’arbre du silence. […] Il n’y avait plus de vent, rien ne bougeait, tout était apaisé, et pourtant j’ai entendu comme un murmure. J’ai eu l’impression - la conviction ? - qu’il provenait de l’arbre dont nous sommes issus : celui de nos familles, dont les branches sont innombrables et dont les feuilles frissonnent au plus profond de nous. Autant de feuilles, autant de voix vers lesquelles il faut se pencher pour bien les entendre, leur accorder l’attention nécessaire à la perception d’un silence qui, en réalité, n’en est pas un et ne demande qu’à être écouté. Je sais aujourd’hui que ce murmure a le pouvoir de donner un sens à notre existence, de prolonger la vie de ceux auxquels nous devons la nôtre, car ils nous habitent intimement. »

- Christian Signol, Ils rêvaient des dimanches

samedi 27 septembre 2025

Réfractaire ou pas ?

Jacques Jadaud est mon ancêtre à VIIIème génération (sosa n°250). Il est né vers 1770 à Saint Amand sur Sèvre (79), mais « un incendie qui a consumé les archives du département ainsi que les registres d'état civil de la commune de St Amand » ne permet pas de le vérifier. Il est cultivateur au lieu-dit La Ruffinière. Il a servi en qualité de simple soldat dans les armées royales vendéennes, pendant 4 ans. Il y a été blessé en 1793 « pour cause de son grand dévouement à la royauté […], atteint d'une hernie inguinale gauche qui lui est survenue au combat de Luçon en sautant un fossé, étant poursuivi par la cavalerie ». A la suite de ces blessures, il a été réduit « dans l'état d'indigence […], ce qui le prive de travailler fort souvent rapport aux coliques qu'il éprouve et de gagner [sa] vie ». Il a demandé une pension, mais ne semble pas l’avoir obtenue. Effectivement il mourra dans un état proche de la misère (sa déclaration de succession ne s’élèvera qu’à 180 francs alors qu’il apportait en dot, lors de son second mariage 35 ans plus tôt, près de 1600 francs).

 

C’est probablement pendant cette époque troublée qu’il se marie avec Modeste Guitton, mais les destructions d’archives citées plus haut nous empêchent de connaître la date exacte de cette union. Ensemble ils auront 5 enfants. Modeste décède rapidement, en 1804.

Jacques se remarie deux ans plus tard avec Jeanne Rampillon (ma sosa 251), d’une douzaine d’années sa cadette, dont il aura 6 enfants supplémentaires.

Son premier beau-frère, Jean Guitton, sera le subrogé tuteur de ses premiers enfants. Il n’aura guère à exercer son office puisque 3 des 5 enfants sont morts avant 1805. Restent Jean, né en décembre 1792 (mais baptisé seulement en avril 1793), et Jacques, né en 1798.

Mais ce n’est pas Jacques père qui nous intéresse aujourd’hui : c’est son fils Jean.


Extrait liste de tirage au sort © AD79

 

Lors de l’appel militaire, Jean fait valoir une hernie pour être exempté. Une hernie abdominale (souvent inguinale – dans l’aine, la plus courante, surtout chez l’homme – ou ombilicale – dans le nombril) rendait le port de la ceinture, du fusil et de l’équipement très difficile, surtout en marche prolongée. Elle pouvait aussi présenter un risque vital en campagne (un étranglement herniaire sans possibilité de chirurgie pouvait se révéler mortel). Dans beaucoup de cas, une hernie était un motif d’exemption définitive ou de mise en dispense temporaire.

Mais cela ne fonctionne pas et Jean est « désigné pour l’armée active ». La liste de tirage au sort n’indique pas le régiment où il a été envoyé, ce n’est pas la vocation de ce type de document (elle sert juste à déterminer le statut du conscrit : appelé ou non). Pour le savoir il faudrait consulter le contrôle des troupes ; ce que je n’ai pas pu faire. Il semble alors partir précipitamment. 

En effet, en juin 1813 son oncle et tuteur Jean Guitton fera une déclaration devant notaire que Jacques Jadaud avait donné à son fils la somme de 300 francs avant son départ pour le service militaire, « à valoir sur les droits à lui échu de la succession de ladite Modeste Guitton sa mère en avancement d’hoirie »*. Mais à cause du « départ précipité » de Jean, il ne put en consentir quittance à son père.

Pourquoi Jean est-il parti ainsi si rapidement ? Les causes, selon ledit Guitton, « sont assez généralement connues sans qu’il soit besoin de les motiver et détailler » ! Dommage pour nous.

 

D’autres détails sur Jean, en revanche, nous sont révélés, bien qu’on s’en serait peut-être passé… En effet, la liste de tirage au sort indique qu’il a été envoyé à l'hôpital militaire pour un « gonflement au testicule droit ». Oups.

 

En avril 1813 on retrouve Jean à Strasbourg. Il apparaît dans un registre de l'hôpital militaire de Strasbourg. Est-ce l’hôpital mentionné dans la liste de tirage au sort ? Le document n’est pas assez précis pour le dire. Hélas, c’est un registre de décès de l’hôpital militaire. Alors qu’il vient tout juste de fêter ses 20 ans, Jean s’éteint à l’hôpital.


L’histoire pourrait s’arrêter là. Mais dans ce registre de décès, Jean est dit « réfractaire au dépôt général » (tandis que sur les autres actes de décès du registre, les affectations des soldats décédés sont précisées). Cette mention semble supposer que Jean était réfractaire. On peut donc imaginer qu’en tant que réfractaire le jeune conscrit aurait été arrêté et placé dans un dépôt militaire, puis qu’il aurait été transféré ou hospitalisé (car malade, blessé ou en mauvais état) et qu’il soit finalement décédé dans cet hôpital.

Un réfractaire désigne un conscrit qui refuse de se soumettre à la conscription obligatoire après le tirage au sort **. Pour mémoire, depuis la loi Jourdan-Delbrel de 1798, tout Français en âge devait exécuter son service militaire. Après le tirage au sort, les jeunes gens désignés devaient se présenter à la caserne ou au bureau de recrutement. Ceux qui ne se présentaient pas ou qui s’enfuyaient étaient dits réfractaires. Ils étaient considérés comme hors-la-loi, et pouvaient être poursuivis par la gendarmerie, arrêtés et incorporés de force et/ou condamnés à de lourdes peines (amendes ou prison). Or si Jean, déclaré « bon pour le service », a refusé d’aller rejoindre son régiment et est entré en clandestinité, que fait-il à Strasbourg, lui qui est originaire des Deux-Sèvres ?

 

Que de questions sans réponse en généalogie !


D’autant que le mystère s’épaissit : lorsque le jeune frère de Jean, Jacques junior, est appelé à son tour en 1818, il est exempté pour cause de « frère mort en service » (c'était un motif possible à cette époque pour échapper au service). Or si Jean (son seul frère aîné) est bien mort, il n’était pas en service proprement dit, si l’on considère qu’il était réfractaire.

En fait, le réfractaire se trouve dans une situation un peu ambiguë, entre le militaire et le civil. Juridiquement, le réfractaire n’est pas encore soldat : il n’a pas rejoint son corps, n’a pas prêté serment, et n’a donc pas de statut militaire au sens strict. Mais il doit l’être : la loi l’a déclaré « bon pour le service », il a été désigné pour un régiment. En refusant de le rejoindre, il devient un civil hors-la-loi, recherché par la gendarmerie. Sous la Révolution et l’Empire, les réfractaires sont poursuivis comme civils délinquants, mais pour un délit spécifique : la réfraction à la conscription. Une fois arrêtés, ils pouvaient être traduits devant un conseil de guerre (donc jugés comme des militaires, même s’ils ne l’étaient pas encore pleinement). Jean est donc un entre-deux : civil par sa situation effective, militaire par obligation légale. Un civil défaillant soumis à la juridiction militaire.

 

Alors que signifie la mention sur la liste de tirage au sort de Jacques : juste un terme conventionnel ? ou bien Jean n’était-il pas réfractaire finalement ?

 

Encore un mystère à éclaircir, un jour peut-être… Ou pas.




Quittance sans doute réalisée en vue de régler la succession de feue sa mère.

** À ne pas confondre avec les insoumis, qui ne se présentent jamais à leur régiment, ou les déserteurs, soldats déjà incorporés qui quittent l’armée sans autorisation. 

 

 

 

 

 

 

jeudi 28 août 2025

Port d'arme prohibée

Dans la série « mes ancêtres sont de petits délinquants » je vous présente aujourd’hui François Jean Antoine Astié. Dans sa fratrie plusieurs ont un casier, comme son frère Benoît, le gentil vaurien dont j’ai déjà eu l’occasion de parler sur ce blog. Certains ayant été condamnés pour des délits mineurs, leurs sentences ont été ensuite effacées. C’est le cas de François.

 

François est né en 1884. D’Angers (49), il arrive à Ivry (94) vers 1905/1906 où il rejoint ses parents et plusieurs de ses frères (tandis que d’autres membres de la fratrie sont restés à Angers comme mon arrière-grand-père). Il est alors un jeune marié et père d’une fillette. Il sera successivement ouvrier de fabrique, garçon maçon, journalier. Son niveau de vie reste très modeste toute sa vie. Jusqu’en 1921 ce sont au total 10 enfants qui se succèdent dans le foyer familial, mais seul deux d’entre eux passeront leur 8 ans (la majorité n’atteignant même pas leur deuxième année). 

Ajourné plusieurs fois lors de l’appel militaire, il est finalement classé dans les services auxiliaires en 1907. Motif : faiblesse générale. Mais en 1914 la situation change. Devant la pression et le besoin de soldats, une commission de réforme le déclare apte au service et il rejoint l’infanterie en janvier 1915. Il fait toute la guerre, notamment sur le front d’Orient. Il est blessé deux fois et reçoit une citation à l’ordre du Régiment : « Bon soldat ayant toujours eu une belle conduite au feu, a été blessé deux fois dans l’accomplissement de son devoir ». En 1927 il recevra la Médaille d’Orient. Après-guerre il s’installe probablement un temps avec sa mère veuve (ainsi que son épouse et ses enfants) au 68 rue Clisson à Paris 13ème (1918/1921). Avant de revenir à Ivry (1923/1926).

 

C’est sans doute rue Clisson qu’il fait la connaissance d’Alexandre André Battin. Celui-ci, un peu plus jeune que lui (il est né en 1888), est journalier, père de deux enfants dont la mère est décédée en 1915. C’est un mauvais garçon. En 1905 et 1908 il a été condamné pour vol (respectivement à 15 jours de prison puis 6 mois). Ce genre de vaurien, l’armée les envoie direct dans un Bataillon d’Afrique. Mais cela ne l’a pas calmé : blessé en 1917, pour la troisième fois, il s’évade de l’hôpital où il était soigné en mai. Aussitôt déclaré déserteur, il est arrêté en septembre… et s’évade le jour même de son arrestation de la gendarmerie où il avait été conduit ! Au bout de trois mois et demi, il rentre volontairement, mais ne peut éviter le conseil de guerre (mai 1918), où il est condamné pour 5 ans de travaux public pour outrage à supérieur pendant le service, rébellion avec arme, double désertion en temps de guerre et vol. Il est écroué en juillet 1918 au pénitencier militaire de Bonnet (division d’Oran), mais finalement libéré grâce à une loi d’amnistie en novembre 1919. 

C’était néanmoins un soldat farouche, qui a reçu une citation à l’ordre du bataillon en 1916 : « toujours volontaire pour les missions les plus dangereuses, est resté dans une tranchée avancée pour observer le tir de notre artillerie au cours des combats du 26 septembre au 3 octobre 1916 sous un violent bombardement ». Rendu à la vie civile, la mauvaise graine n’a pas fini de faire parler de lui : en 1920 il reprend 6 mois prison pour coups et blessures volontaire, violences, voies de fait et rébellion aux agents.

 

C’est pendant cette période qu’il fait la connaissance de François. Ils sont suffisamment liés d’amitié pour qu’Alexandre soit le témoin de la naissance du dernier enfant de François, né en 1921 au 68 rue Clisson. Et en 1923 ils sont conduits tous les deux devant le tribunal pour port d’armes prohibées

 

Extrait du jugement © AD75 via FDA75

 

L’audience publique a lieu de 7 mai 1923, devant la onzième chambre du tribunal de première instance du département de la Seine. Elle est présidée par M. Mayet, accompagné des juges Claude et Camus. Sont également présents, le substitut Fremicourt et le greffier Cartier. Plusieurs affaires sont jugées ce jour-là, essentiellement des ports d’armes prohibées, comme pour nos deux compères. Le premier qui est jugé a de la chance : après examen, l’arme trouvée en sa possession (un couteau), ne rentre finalement pas dans la catégorie de celles qui sont prohibées ; il est acquitté. Le second était porteur d’un « couteau Laguiolle » : 25 francs d’amende. Le troisième et le quatrième, 50 francs. Puis vient le tour de nos deux larrons.

 

Revoyons les faits : le 28 janvier 1923 à Paris, Battin et Astié ont été trouvés porteurs hors de leur domicile et sans motif légitime, savoir : Battin d’un poignard et Astié d’un revolver, armes prohibées.

Des poursuites sont engagées à leur encontre, sans doute par le Procureur de la République, pour infraction à la loi du 24 mai 1834 relative aux détenteurs d'armes (art. 1er et suivants), telle que modifiée par les mesures d'ordre public prises durant la guerre.

Les prévenus ne sont pas présents le jour de l’audience, et n’ont sans doute pas engagé un avocat pour les représenter. Ils seront donc condamnés par défaut.

Dans ce cas, si les prévenus le souhaitaient, ils pouvaient conserver la possibilité de faire opposition au jugement dans un délai déterminé (généralement 5 jours à l’époque pour un tribunal correctionnel) afin d’obtenir un nouveau jugement en leur présence. Cela n’a manifestement pas été le cas pour Battin et Astié.

De fait, comme ils n’étaient pas présents et qu’il n’y a pas eu de débat contradictoire, on ignore les raisons qui les ont poussés à porter ces armes, ni où et quand ils se les ont procurées. Ils n’ont évidemment pas pu plaider leur défense, avec des motif type « légitime défense » ou « usage personnel en dehors de toute intention de trouble à l'ordre public » que l’on trouve parfois dans ce type d’affaires. Quoi qu’il en soit, l'intention alléguée de se protéger ne suffit pas à légaliser la détention d'un revolver non autorisé en dehors des cas prévus par la loi. Le port d’arme prohibées est un délit prévu et puni par l’article 1 de la loi du 24 mai 1834, modifiée par la loi du 27 décembre 1916.

La loi de 24 mai 1834 instaure un régime pénal visant à interdire et sanctionner la fabrication, le commerce, la détention ou le port non autorisé d’armes et de munitions (notamment celles dites « de guerre » ou « prohibées »). L’esprit de l’article 1 (et des articles qui suivent) est de permettre à l’État d’empêcher la circulation d’armes susceptibles de menacer l’ordre public. La loi prévoyait des peines d’emprisonnement et des amendes pour fabrication, détention ou commerce illégaux ; elle permettait aussi la confiscation des armes et, dans certains cas, des mesures administratives supplémentaires (surveillance, etc...). Les peines varient suivant l’article concerné (fabrication, commerce ou port).

 

La loi du 27 décembre 1916 contient une modification qui complète la loi de 1834 :

« Dans tous les cas, les armes et les engins prohibés seront confisqués et détruits à la diligence du procureur de la République. ».

 

Cette modification signifie que l’exécution de la mesure (la destruction des armes) incombe au parquet : après saisie et condamnation, c’est le ministère public qui organise la destruction. En pratique, la confiscation et la destruction deviennent des conséquences habituelles de la condamnation pour port ou détention d’armes prohibées.

 

Mais revenons à ce mois de mai 1923. Les juges se retirent pour discuter de l’affaire et prendre leur décision, comme l’exige la procédure et après en avoir délibéré, conformément à la loi, attendu qu’il résulte des documents de la cause (c'est-à-dire toutes les pièces écrites du dossier : procès-verbal de police, rapports, expertises, témoignages écrits, etc…) et des débats (ce qui a été dit ou produit oralement à l’audience : déclarations, interrogatoire, plaidoiries, réquisitions), le Président a lu l’article 1 de la loi de 1834 :

Article 1er :

« Tout individu qui aura fabriqué, débité ou distribué des armes prohibées par la loi ou les règlements d’administration publique, sera puni d’un emprisonnement d’un mois à un an, et d’une amende de seize francs à cinq cents francs.
Celui qui sera porteur desdites armes sera puni d’un emprisonnement de six jours à six mois, et d’une amende de seize francs à deux cents francs. »

 

Le Tribunal déclare que, dans tous les cas, les armes prohibées seront confisquées et détruites, à la diligence du Procureur de la République, selon la loi de 1916.

 

Cependant, grâce à l’article 463 du code civil, les deux prévenus voient leur peine modérées en raison des circonstances atténuantes. Sauf disposition contraire expresse, dans tous les cas où la peine prévue par la loi est celle de l'emprisonnement ou de l'amende, si les circonstances paraissent atténuantes, les tribunaux correctionnels sont autorisés, même en cas de récidive, à réduire l'emprisonnement et l'amende. Nos deux compères ont donc bénéficié de circonstances atténuantes. Malheureusement on ignore quelles sont ces circonstances. Est-ce que leurs brillants états de services pendant la Première Guerre Mondiale a joué ? Où étaient-ce juste parce que la peine prononcée était légère ?

 

Enfin, le tribunal :

  • condamne Bottin et Astié, chacun à 25 francs d’amende.
  • les condamne en outre solidairement (ils sont tenus ensemble et chacun pour le tout du paiement : si l’un ne paie pas, l’autre doit payer à sa place la totalité de la somme.) aux dépens (c'est-à-dire aux frais de justice : procédure, huissier, expertise, etc…) liquidé à quatorze francs soixante centimes plus deux francs pour droit de justice.
  • fixe au minimum (pour une somme modeste, le minimum pouvait être de 5 jours. Ce minimum était souvent appliqué dans les affaires mineures, surtout quand le tribunal estimait que le condamné n’avait pas de grands moyens financiers) la durée de la contrainte par corps (mesure qui permettait à l’État, quand un condamné ne payait pas son amende ou ses frais de justice (« dépens »), de le détenir en prison pendant un certain temps à la place du paiement — une sorte de conversion de dette pénale en emprisonnement) pour le recouvrement des amendes et des dépens. Si les condamnés ne payaient pas, ils pouvaient donc être emprisonnés pour la durée fixée (ici, le minimum), puis libérés même si la dette restait impayée — l’État abandonnant alors la créance après la détention.
  • prononce la confiscation des armes prohibées saisies et en ordonne la destruction, selon la loi de 1916 comme on l’a vu plus haut.

 

Donc les prévenus sont condamnés à une amende de 25 francs. Rappelons que ce montant, même minime, n’est pas négligeable dans le budget d’un garçon maçon, comme l’était François en 1923. Il est très difficile de donner le chiffre précis d'un salaire journalier moyen pour un maçon à Paris à cette époque car les données sont fragmentaires et les salaires pouvaient varier considérablement selon son expérience, sa qualification et l'entreprise qui l'employait. Cependant, on peut estimer qu’il se situait probablement entre 20 et 40 francs par jour. Par comparaison un journalier non qualifié tournait souvent autour de 10 à 15 francs.

La nourriture absorbait une grande partie du budget. Au début des années 1920* :

  • le pain coûtait environ 1 franc le kilo
  • le litre de vin environ 1,60 franc
  • les haricots secs un peu plus de 0,20 franc le kilo
  • le litre de lait coûtait environ 1 franc
  • la viande de bœuf près de 15 francs le kilo
  • le kilo de beurre un peu plus de 16 francs
  • la douzaine d’œufs près de 8 francs
  • le kilo de sucre 3,60 francs

Restaient les vêtements et les chaussures, l’éclairage et le chauffage, les à-côtés (transport, tabac, journal, etc…). Et bien sûr, le loyer (François n’était pas propriétaire). Les loyers à Paris pour les ouvriers étaient très élevés par rapport à leurs revenus. Un loyer pour un logement modeste, comme devait l’occuper François, pouvait représenter 30 francs par mois.

 

Donc une amende de 25 francs pouvait correspondre à près d’un loyer mensuel, ce qui a dû considérablement grever le budget familial.

 

Battin et Astié ont-ils payé leur amende ? C’est probable car il n’est fait mention nulle part du contraire (notamment d’une prise de corps, comme le prévoyait le jugement du tribunal en cas de défaut de paiement).

La condamnation des deux hommes s’est retrouvée transcrite sur leur casier judiciaire et, de façon automatique, sur leur fiche matricule militaire. C’est elle qui m’a alertée la première de cette affaire. Or la mention de cette condamnation est biffée. Cette inscription rayée correspond à un effacement juridique de la condamnation. La fiche de François reste muette sur cette modification. 

Mais si l’on se reporte à celle de Battin, on voit qu’il a bénéficié de la loi du 3 janvier 1925 ; ce qui est très probablement le cas aussi de François. Cette loi est une loi d’amnistie qui efface les condamnations de certaines infractions, notamment lorsqu’il s’agit d’un délinquant primaire (comme c’est le cas de François) pour des faits commis antérieurement au 1ᵉʳ novembre 1924 ou sous certaines conditions spécifiques (peine pécuniaire légère non alourdie par un délit de fuite par exemple) ; les infractions sévères en étaient cependant automatiquement exclues.


Cette amnistie éteint l’action publique et efface la peine rétroactivement, comme si l’infraction n’avait jamais existé. Administrativement, on raye la mention sur la fiche militaire pour ne plus la prendre en compte dans l’avancement, les décorations ou la notation. Néanmoins, la fiche matricule n’est pas le casier judiciaire : elle ne contient qu’une partie des informations, et son effacement ne préjuge pas de l’état exact du casier. Si la condamnation amnistiée est radiée du bulletin n°2 (celui que voient l’administration et les employeurs publics) et du bulletin n°3 (celui que la personne peut demander), elle peut rester mentionnée au bulletin n°1 (réservé aux autorités judiciaires) avec indication de l’amnistie, surtout pour établir l’historique judiciaire. Donc, pour la vie courante et les démarches, c’est comme si le casier était vierge (on dit qu’il est « blanc »), mais la trace n’est pas forcément effacée pour les juges.

Quant à l’amende, même en cas d’amnistie ou de réhabilitation, les sommes déjà payées (amendes, frais de justice, dommages-intérêts à la partie civile) ne sont pas remboursées. L’amnistie efface les effets pénaux de la condamnation, mais ne crée pas un droit à restitution des sommes versées.

 

Si on n’a pas tous les détails sur cette histoire (notamment la façon dont elle a commencé), il semble que le jugement y ai mis un point final et François ne fut plus arrêté ni condamné.

 

 

 

* Selon le site France-inflation.com d’après les Statistiques Générale de France, puis Insee après 1950.

 

 

lundi 14 juillet 2025

Enquêtes généalogiques à télécharger

L'été est enfin là, invitant à la déconnexion, à la douceur de vivre et à de nouvelles aventures. Peu importe votre destination – que ce soit l'appel du large, les sommets montagneux ou le canapé de votre salon – un bon livre reste le compagnon idéal pour savourer pleinement ces moments d'évasion.

Vous aimez les polars ? Vous êtes passionnés de généalogie ? Voici deux livres, format ebook, pour éviter d'alourdir vos valises. A lire sans modération pour occuper vos temps libre ! L'été s'annonce chaud : voici donc de quoi vous rafraîchir en vous glaçant le sang ! Larguez les amarres avec ces deux histoires qui nous entraînent sur la piste d’énigmes réelles ou imaginaires, mais toujours captivantes. Découvrez, ou redécouvrez, vos meilleurs compagnons de route pour cet été en les téléchargeant gratuitement ci-dessous.


 

Des histoires basées sur des faits authentiques, assaisonnées d’un soupçon de frayeur et d’humour, voilà de quoi vous permettre de passer d’agréables moments. Des histoires pour rêver, frissonner, rire ou vous inspirer (pour la recherche généalogique, hein ? pas pour le crime !)…

Si vous êtes fidèles de ce blog, vous avez peut-être déjà lues ces deux enquêtes généalogiques, publiées dans le cadre du ChallengeAZ, mais n'hésitez pas à y revenir !


La première est le polar écrit en 2020, dans une version quelque peu augmentée.

Titre : "Les racines du crime"

Résumé : En 1942 une série de lettres anonymes dénonce, auprès des autorités, Henri Macréau comme l’assassin de sa femme disparue Ursule Le Floch. Une instruction est ouverte. 75 ans plus tard, à la suite du décès de son grand-père, Alexandre vide la maison familiale et découvre des pièces fragmentaires de ce dossier. La curiosité piquée par cette affaire mystérieuse, il décide de contacter la descendante du couple au cœur de l’affaire. Ensemble ils enquêtent pour retrouver la trace d’Ursule et faire toute la lumière sur cet épisode du passé.

Pourquoi le télécharger ? : un polar parfait pour les vacances, pour faire frissonner ses soirées, qui mêle émotion, généalogie et idées de recherches pour développer son histoire familiale. Parfait pour les amoureux des livres et des secrets bien gardés. Suspense garanti ! 

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La seconde est l'enquête des juges pour découvrir qui a tué le soldat Espagnol du Régiment de Séville à Samoëns en 1748 (ChallengeAZ 2024). 

Titre : "Et au dedans, un cadavre..."

Résumé : En ce jour de février 1748, un cadavre est retrouvé dans les bois de Bérouze, à Samoëns. Il s'agit d'un soldat Espagnol du Régiment de Séville, en garnison non loin de là. Aussitôt le juge Delagrange est prévenu et commence l'enquête. Qui en voulait au soldat ? Et pourquoi François Jay, son épouse, leur servante et le révérend Chometty se sont-ils sauvés dès que le cadavre a été découvert ? Quels relations entretenaient-ils ? Que s'est-il passé ?

Pourquoi le télécharger ? : une enquête idéale pour les lecteurs avides de résoudre un crime, entre adultère et légitime défense. Pour les amateurs de crimes historiques et les détectives en herbe.

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